Suppléments d'âme & Bouts d'humanité

fchazal, quondam incipio auctor ab MMVII

Toxique

Joyeux erre dans un jardin jauni, il s’avance sans crainte, et se laisse capter par la fleur que voilà. Sa couleur est d’or pourpre, ses effluves suaves, elle exhale la richesse, une beauté toute parfaite.

Mais les épines sont noires, cachées sous le feuillage qui le piquent, l’accrochent et lui tire des cris, les larmes vermillon perlent sur le poignet, la rose était trop belle.

Le promeneur repart, attristé, apeuré d’une nature violente qu’il n’avait soupçonné.

La vipère dans le fruit, n’y va pas mon ami, car toxique je suis.

Vieilles ennemies

Le Doute et l’Anxiété, vieilles ennemies liées qui s’accrochent et m’écorchent, retirant à ma vie petites joies, grandes folies, ne laissant qu’une friche, terre rase et boueuse.

Waterloo trop présent d’un retour qu’on attend, ne trop savoir comment, ne trop savoir pourquoi, à quoi bon, vieille antienne anonnée qui resume en un souffle celui qui manque encore au démarrage des temps.

Alors on avance, zombie, au son du métronome, on claudique, maladroit, se tient au bastingage et rugit dans le froid : lâchez-moi, laissez-moi, ennemies d’autrefois !

Une pipe sinon rien…

Les volutes s’élèvent dans la pièce, brins de fumée évaporés.

La bruyère au bec, je suis assis dans le fauteuil. Salon tamisé, musique baroque et le chat sur les genoux. La pipe c’est un moment de calme, ça n’a rien à voir avec cette clope qu’on arrache au temps entre deux rendez-vous, petit moment volé, sas de décompression d’un vie à mille à l’heure. La bouffarde se mérite, on doit y consacrer du temps, s’arrêter vingt minutes, préparer le brûle gueule, le bourrer, l’allumer, en tirer quelques bouffées.

Profiter de la première, comme d’une première gorgée, tout est là et ne subsiste pas. La première c’est un moment spécial, le palais encore vierge, les odeurs décuplées. On se laisse apaiser, l’odeur est douce amère, coussin de fumée qui envelope la langue. Pas question d’avaler, la pipe ça se recrache, se crapote doucement. Nul odeur âcre du papier, tout n’est que feuille de tabac à l’humidité contrôlée.

Je m’y suis mis le temps d’un confinement. Alors je venais de perdre ma grand mère maternelle (la seconde ne tarderait pas à la rejoindre mais je ne le savais pas encore) et dans la vieille maison qu’il nous fallait vider, je retrouvais ses pipes. Cela faisait 11 ans qu’il nous avait quitté et rien n’avait bougé. La nostalgie me cueillit, vieille amie qui veille sur mon épaule.

Sitôt rentré, j’achetais de l’Amsterdamer et allumais ma première écume, celle qui trônait au coin de l’âtre dans ce bureau où l’aïeul s’attablait sur un courrier et où je veillais le feu. Trop fort, trop amer, la tête qui tourne, l’odeur trop lourde, je ne pus la finir, ni tirer quatre bouffées mais l’odeur résista, rappelant avec elle ces moments du passé oubliés, enfouis dans les méandres de l’enfance.

Des retours en voitures où papy fumait sa pipe et mamie s’alarmait de l’odeur trop présente, des après midi d’hiver où seuls tous les deux dans la pièce du fond, il allumait sa pipe face à la cheminée en me parlant de son enfance.

Souvenirs si lointains du fond des années 90, il n’avait plus touché la pipe depuis son infarctus, alors j’étais en 3ème. La mémoire est prodigieuse qu’elle ramène au présent un passé si ancien qu’il se perd dans le temps.

Depuis j’y ai pris goût, une fois de temps en temps, un blond de Virginie aux doux pétales de rose, une odeur plus subtile, moins têtue, plus sucrée sur un coin de journée quelques fois dans l’année. Une pipe taille enfant aux rayures de matelot, mais une bruyère Chacom acquise un jour d’été dans mes terres natales.

Les volutes s’envolent, la fumée effacée mais l’odeur subsiste d’un foyer oublié…

Au loin

Se lever, s’éloigner, s’effacer une journée,
Retrouver, juste assez de ce calme serein.
Bord d’une île, terre aride, sans lagon, ruche, essaim
Bord de vie bien fragile, par un fil avalé.

Alors vivre, se forcer, s’empêcher de penser,
S’engouffrer sans envie dans la foule des métros
Se laisser emporter sur les rails, hors de moi, hors du lot,
Espérer un instant retrouver cet allant échappé.

Trifouiller

Oh le beau mot, à peine usé, morceau d’antan ressuscité !

La nuit fut agitée, les songes mal-aisés, le chaton indécis sous une pluie noctambule.

Le réveil n’est pas mieux, les pensées se sont tues mais ce n’est qu’une trêve…

Le réveil est brutal, le ciel est gris d’acier. Dans le miroir des rues, j’avance d’un pas plombé. Nulle envie, nul désir, nul amour, nulle vie.

Assis sur canapé, le crâne est entr’ouvert ; on s’en va trifouiller ce qui gratte, ce qui ronge, tous ces causes, ce mal-être, cette envie d’arrêter.

À quoi bon se lever, si c’est pour s’effondrer. Le ciel est gris d’acier, la chape va retomber…

Hésitation

Dix fois, vingt fois, sans foi, remettre le travail à l’ouvrage.

S’y pencher, hésiter, ne trop savoir pourquoi, ne trop savoir comment, hésiter, douter, poser.
Reprendre, d’un coup de tête, d’un coin de table, reprendre, reposer, repenser et douter, hésiter, reposer.

Ne plus trop savoir, douter, toujours douter, accouchement douloureux…

Quand le doute fige l’âme, arrête le geste et attend que le temps ne force le passage.

 

Laisser aller, laisser couler

Se réveiller fatigué, s’éveiller englué, se lever et tomber…

La vie est terne, la vie est grise, la vie s’enfuit loin de soi loin des autres,
Quelques pas rien de plus, quelques sons las et tout s’efface et tout s’enfuit loin de soi loin des autres.

S’éveiller hors de soi, ne plus être, ne pas être, sac de toile diaphane, fatiguée, épuisée et partir s’éloigner, s’effacer et puis fuir…

En temps et en heure

La tasse est fumante, d’un liquide brun clair, le temps dehors est gris et seul attablé je repasse les années. Petit thé réconfort sur coin de canal, la journée n’est pas belle, elle n’est pas pour autant triste augure du temps qui passe.

Apprivoiser le temps, ce titan qui chaque seconde ronge, écrase et ne laisse que la poussière !

Le petit enfant

Caché sous les couvertures, oublié, il n’attend que le moment propice pour se rappeler à nous ce petit d’homme, cette humanité fragile qui réside et se love.

La fatigue, le stress, les souvenirs qui saisissent l’âme, nulle psychanalyse pour en comprendre sa sortie cette semaine d’octobre lors d’un voyage à Londres.

Mardi soir, fin de journée en bordure de Tamise où le travail m’a porté, je file à mon hôtel tout guilleret d’une soirée bien méritée à Camden… la fatigue, la gêne, je ne sais trop expliquer ce qui se passe mais résultat je finis à l’hôtel.

Dictature du X (1/2)

Point de cela entre nous, rentrez donc chibres et vis poilus car le moment n’est pas au déballage des sens mais à celui des émotions. Car seize années durant, j’ai parcouru les monts, les vallées escarpées d’un monde d’oiseaux bleutés.

Il n’était guère joli mais il s’était fait seul, sans aide de nulle part il était comme on est : un corpus mouvant aux reflets inconstants aux frontières floutées.

Il était au début un monde où découvrir où trouver des amis (des monuments depuis, n’est-ce pas l’ami @matoo), où chacun s’exprimait, écrivait ses idées, ses souffrances et ses tags.

Et chaque vendredi était l’heure du rituel faisant fleurir les #FollowFriday comme une trainée de poudre. Curation des amis, des blogueurs, de ces autres que les amis aimaient, découvertes d’autres mondes, d’autres verbes, d’autres êtres.

Puis vint l’envie de se voir, autour d’une après-midi Ladurée avec les quelques-uns parisiens dont je me sentais proche. Ou de se retrouver le temps d’une soirée, d’un des mythiques TwitApéros de l’ami @newem dont les JeudisBeuverie ne sont qu’un pâle reflet et qui inexorablement se finissaient au McDo de l’Hotel de Ville !

Alors j’abandonnais ces rivages, gardant bien contre moi ces amitiés offertes, oubliant quelques années ces berges si accueillantes qui m’offrirent de vivre mes plus belles années de pédéparisianité !

Quelques années passèrent et de ce monde bleuté aux quelques ramages bien lestes devint d’un arbre gigantesque où la diversité n’avait d’égale que le clivage, où politique, journalisme et sexe fleurissaient plus désormais que la trainée d’amour (parfois vachard) que j’avais découvert à ses jeunes années ! Seule constante subsistante : l’amour du drama, de cet art de la posture exagérée où les gris cèdent le pas soit au noir soit au blanc !

Alors revinrent à moi ces moments d’allégresse à découvrir les gens, à se laisser aller à l’amitié facile, à ces folles découvertes d’à l’autre bout de France, à se laisser griser par quelques mots échangés et franchir le pas du rail !

Et c’est là que l’oiseau tomba de son nid…

… la suite demain !

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