Suppléments d'âme & Bouts d'humanité

fchazal, quondam incipio auctor ab MMVII

Petits rituels oubliés

L’année fût une épreuve, chamboulant tout, renversant sur son passage, ces digues, ces rochers, ces petits rituels de rien posés là pour étayer mon psyché.

Oubliés les réveils matinaux, adieu le thé vert et bonjour au café fort pour faire lever les morts. Où est-il cet instant, ce moment quotidien où les pensées défilent, s’organisent, cette méditation active reprise de la veille, des actions, des idées qui me passent en tête et s’étalent sitôt sur les feuilles de papier ?

Le yoga s’est éteint, toutes ces choses qui m’aidaient, pschiit, ffffuit, plus rien tout s’est envolé me laissant sans armure, sans plus rien pour apaiser mon âme.

Prendre conscience, voir tout cela sans retenue, sans faux semblant et faire face, voilà le premier acte pour reprendre ces instants, ces minutes matinales égrainées dans le temps, ces morceaux de moi-même arrachés, oubliés qui m’appelle d’outre-tombe.

Et de reprendre les rituels, ces petites ritournelles qui jalonnent chaque journée et rappelle le beau, le bon, la joie, la gaieté dans un esprit chagrin.

Une vie de Chat

S’allonger pour la journée, sous la douce moiteur des couvertures. Se laisser porter par le calme ambiant et oublier l’espace de quelques heures le fracas de la vie, les questions, les envies…

L’avoir tout contre soi, cette boule de poil, déployée contre son flanc. Vrombissement de contentement, les yeux clos, le sourire au coin des babines. Il s’étend, se détend, se love contre la chaleur de son maître, se laisse plonger dans le néant, dans l’oubli du temps qui s’effile et ne laisse de son passage que ridules et inquiétudes.

Se laisser épouser pour la journée la couette et le matelas, yeux clos, un livre audio au oreilles, se laisser conter une vie d’imaginaire, un moment d’oubli qui s’étire et s’allonge à l’infini. Oublier tout, saoul de cette douce chaleur, relâcher tous ses muscles, relâcher tout son corps et sentir contre soi la petite boule de poils qui ronronne et s’oublie elle aussi à la beauté d’un instant, dans le moment qui se distend.

Reprendre enfin conscience, délaisser ces mesures d’instant et de moment, se revoir sans jugement. Se laisser le temps d’un songe, le droit de s’oublier et reprendre le présent, éternel jour du condamné…

Sancerre sur la Colline

Petit coin de verdure auprès de bons amis. Quelques pensées posées là, le long d’un si court week-end de l’ascension…

Colline à flan de côteau, les vignes en contrebas.
Le chateau surplombe les lieux et Sancerre à ses pieds.

Ruelles serpentines qui enserrent les hauteurs,
Sensations médiévales, vieilles pierres et église.

La Loire, vieille indolente se déploie au creux des vaux, elle est Reine ici bas.

Comme une autre Côté d’Or, sa terre ocre, ses fossiles et ses vignes qui s’enfilent colline après colline.

Le coin est valloné, les vins rouges charpentés et les blancs parfumés. Les verres défilent, les rires se déploient autant que les arômes, ne subsiste dans l’air que le goût doux amer d’un souvenir d’enfance, un morceau d’insouciance.

On oublie le temps qui file et se laisse reposer au creux des amitiés, dans la douce moiteur d’un crachin épisodique, dans cette tendre chaleur d’un soleil qui perce par les trouées.

Ce fut un beau moment… un de ceux qu’on aimerait arrêter pour le faire continuer !

L’abandon

Quelques sombres pensées jetées là pour les remiser hors de moi, pour jouer avec les mots sur un sujet glaçant. Tout va bien, pas d’inquiétude 🙂

Il est seul, il est tard,
Comme une ombre dans le noir.

Ce soir il partira,
Oublié par les siens.

Il fait sombre, il est tard,
Il est seul dans le noir.

Cette nuit il s’en ira,
Oublieux de ses liens.

L’abîme comme seul ami, l’oubli comme seul refuge.
Le gouffre avale ses joies, en étouffe les pleurs,
Et ne laisse derrière lui que silence et néant.

L’ami est oublié, nul refuge, nulle excuse,
Ne subsiste plus rien, ni les larmes, ni les peurs,
Ne résiste que l’oubli et l’appel du néant.

Adieu petite lame, écarlate qui perle et éclate dans l’ocre…

Demies lunes au soleil

Il fait beau, il fait chaud, petit tour de vélo dans un Paris éteint.

Se promener au gré du vent, passer Bastille, l’Arsenal, chemin faisant couper la Seine et voir paraitre au coin de l’oeil ces demie-lunes pleines de souvenirs, d’une époque presqu’oubliée d’un temps plus étudiant…

Alors bifurquer et prendre le long des berges, déposer son cheval de métal sur la rade de pierre et poser pour une heure ses pensées sur les flots. Un couple sur la terrasse, un morceau piazzolesque qui résonne sur fond d’écume, des danseurs de tango corps et âmes le long du fleuve…

Se plaire à les regarder, à apprivoiser cette danse, cette transe et ce rythme chaloupé qui appelle les pas, les hanches, tout son être. Alors voir s’attrouper peu à peu les quidams en passage sur les berges rappelant pour quelques instants les années oubliées.

Paris est une fête, de ces moments volés gravés sur l’escalier d’une berge isolée. Paris est fait d’instants à cueillir au plus vite, de ces baisers furtifs, privilèges intimistes à la douceur de pêche…

Ménil-Chantant…

L’église est là, impassible et massive. Elle attend sereinement l’arrivée des badauds qui se massent sur ses marches au soleil printanier. C’est de ces monuments qui marquent un quartier. De ces places d’autrefois où s’attroupent les locaux.

On s’assoie dans son ombre. On y parle, s’y retrouve, y échange un repas, un café, une cannette. On s’y pose en lumière, un gros livre à la main et laisse peu à peu dériver ses pensées dans l’air frais et l’oeil chaud d’un soleil bienveillant.

Alors commence la magie de ce quartier vivant qui cultive son histoire. Alors s’élèvent des chants qui sortent de sa torpeur le passant assis là, arrêté dans le temps d’une après-midi calme sur le chaud réconfort d’une pierre séculaire.

Les voix s’ajoutent au choeur, l’accordéon en fond et résonnent les airs d’un Paris d’autrefois. Le temps de quelques balades oubliées ressurgit du passé un quartier populaire, communard et fier.

S’enchainent les tubes de la belle époque, quelques chansons oubliées, certaines que l’oreille remet à peine. C’est alors qu’on reconnait le Temps des Cerises et se prend à fredonner cet air lent et triste avant que ne résonne sur les murs de l’église l’Internationale aux paroles plus martiales empruntes d’humanisme. La politique divise mais le chant nous rapproche par son universalisme…

Ce quartier, c’est le mien, c’est là où j’ai posé mes valises et me laisse emporter chaque jour dans les valses du temps.

Recommencer à zéro

Comme une hygiène de vie, comme ces marottes qu’on délaisse sans trop savoir pourquoi mais qui un jour nous manque sans autre raison que d’en sentir le manque auprès de soi, au fond de soi…

Alors reprendre la plume, la course d’un jet d’encre numérique sur un papier LCD, reprendre la marche et quitter l’espace d’un esprit trop encombré pour coucher par l’écrit l’ensemble de mes idées, l’espace de mes pensées.

Alors ressusciter les morts, les rappeler à soi, reprendre à incipio et poursuivre l’allée sous l’ombre des tilleuls, de ces odeurs familières qui forgent un caractère et laissent au creux de l’âme la sensation douce amère d’un souvenir d’enfance depuis longtemps envolé mais redonne au présent les rires du gosse idiot qu’on fût un jour.

Un moment de douceur sur un bord d’éphémère, voilà ce qui me manquait dans ce monde si bruyant, si fragile, si violent qui me broie… Alors je sauverai mon âme en la mettant ici bas dans ces capsules inertes !

Mimine, adieu…

Rassure-toi, je ne pleurerai pas, tu me l’as fait promettre voici 6 mois de cela. Tu n’étais pas là et c’était déjà un pilier qu’on enlevait de mes fondations. Aujourd’hui on retire le dernier, j’espère que la maison est solide, nous verrons…

Mes souvenirs sont biens confus, autrefois la Mamy stricte du brossage de quenottes obligatoire, de la marche digestive imposée. Les vacances chez toi avaient par moment des avant-goûts de service militaire ponctué de ces morceaux de chocolat distribués avec malice.

Avec l’âge les souvenirs se meuvent et peu à peu le Caporal Quenotte a cédé la place à ma Mamy sourire, ma Bonnemine, ma mimine, toujours à vouloir sourire à la vie. Tu étais la Mamy tarte au thon, framboisier, guignolet et – il va sans dire – pain-beurre-chocolat ! On devrait l’écrire sur le marbre celle-là, on y est tous passés, on y a tous gouté, on l’a tous plébiscité.

Alors pour tout le monde, c’est pas compliqué, vous prenez du Lindt au lait (les marques c’est important avec toi) comme tu l’aimais, vous le rapez avec le couteau en morceaux inégaux (oui ça fait partie du plaisir), vous prenez du Plantafin (oui c’est pas du beurre mais c’était comme ça chez toi et le goût est inimitable) et une baguette fraîche (une vraie baguette, le goût du pain, du vrai, du bon, tu l’avais dans le sang), pour l’assemblage, rien de plus facile, on met une belle couche de margarine sur une belle tranche de pain et on l’écrase avec doigté sur l’assiette remplie de copeaux de chocolats. Succès garanti, le Nutella tu ne connaissais pas !

Chez toi, c’était confiture de griotte, fruits de saison et bon pain, sourire de rigueur, joie de vivre et bonne chère. On y mangeait bien, ma gourmandise doit venir de là.

Oui, oui, je sais Mamy, j’en ai un peu trop profité dernièrement… Je vais faire un effort, promis. Regarde déjà, j’ai pris un peu de couleurs en Bretagne ! C’est pas comme les cousins, toujours hâlés… Qu’y puis-je si je suis tombé du côté cérébro-maladif de la famille ?

Non, non, je ne me plains pas, ne pas se plaindre… jamais… c’est IN-TER-DIT ! Ah ça, la fin a été pénible pour toi, cela devenait difficile de ne pas t’attrister en te voyant diminuer jour après jour.

Chez toi c’était Sardou, 4-21, rigolades et magazine de la santé, non que les sujets t’intéressaient particulièrement, mais bon il faut avouer qu’il était tellement drôle Michel Cymès. C’est comme la carte aux trésor, c’était beau tous ces paysages, le reste n’avait que peu d’importance. Voilà ta marque de fabrique, ne te prends pas au sérieux, regarde le beau, profite du drôle, et avance malgré les épreuves.

Car les épreuves, tu en as eu ton lot… Fille cadette d’une grande famille, ils sont tous partis l’un après l’autre, ton mari aussi, t’offrant une troisième vie bien remplie, les voyages, les sorties, et puis Papy et Mamie aussi. Elle, elle t’en a fait un coup ; c’était il y a 6 mois, deux jumelles aussi contrastées que Janus. Encore une fois tu étais la cadette mais de peu… Certes, tu rigolais mieux avec Papy mais lui ça fait longtemps, il est vrai qu’on ne l’oublie pas facilement ce pitre selon Saint Mathieu.

Ton divan c’était la table de la cuisine, on y partageait tout, la boisson, les confidences, les souvenirs, les tartes aux abricot. Ah ça, si les murs pouvaient parler, cette pièce serait un hall de gare.

On y a partagé jusqu’au bout… Vers la fin tu n’étais qu’une petite brindille mais toujours le sourire aux lèvres, de plus en plus crispé, la vie n’était plus drôle. Plus de jardin, plus de télé, plus rien… Toi qui avait fait de ta vie un mouvement incessant, tu ne pouvais plus rien, n’avais plus goût à rien. Cette pensée qui t’assaillais jour après jour s’est enfin tue, et te voici enfin en paix.

Malgré ma promesse, tu n’empêcheras pas ma tristesse. Tu resteras mon rayon de soleil, ma mimine…

Choisir sans objet…

J’avance dans le noir, trébuche, vacille et continue la marche. Ici nul cafard, juste la triste réalité d’une vie sans objet. Finies les espérances, oubliées les souffrances des actes inachevées, sabordés ou volés.

Dans cet aller sans retour d’une vie sans raison, je vais serein, j’avance attentif à ces petits moments, ces petits riens qui chaque pas faisant offrent au quotidien ses petites joies, ses émerveillements de l’enfant.

Mais la nuit est bien sombre et sans objet, je erre et poursuis ma route sans la voir ni la cerner, pour seul certitude une fin tardive ou prochaine. Qui sait donc ce que demain me réserve ?

Alors j’avance, zombie qui s’ignore, j’avance et parfois me réveille de ce songe de vivant, et parfois vois la folie dans cet quête sans but si ce n’est la fleur du chemin. Est-ce là déraison ou sagesse ?

Est-ce là douce folie qu’un monde où l’oubli donne la lumière et les buts posent les chaines ? Dois-je me réveiller ou bien accepter cette condition humaine qui impose les questions et refuse les réponses ?

Seule certitude, ce choix incessant, l’embrasement de l’âme qui désir qu’on s’en saisisse et qu’on tranche pour la vie, l’engagement alors même que tout ceci semble si vide, si creux, si limité… Dormir !

Deux Ponts et l’Aven… ture

La ville est bourgeoise, massive, à flanc de coteaux. Nuls colombages dans ces maisons de pierre qui jalonnent le cour dont la ville porte le nom.

Comme sorties du sous-sol, accrochée, indomptables, les masures rugueuses nous regardent arpenter les petites ruelles gorgées des aoutiens en quête de confiseries.

Pont-aven se dévoile en arrière cour, dans une promenade plantée rigolant sur ses eaux.

L’aven grossit soudain et devient un port, une rivière immense qu’une promenade borde de vieux chênes centenaires à l’écorce décharnée, torturée comme sculptée. Le temps à laissé là ces vieux arbres dégénérés, patriarches que veille un parterre de rochers.

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